Mission à Calais
Nous sommes 3 en mission à Calais pour assurer une présence auprès des nombreux exilés qui transitent par cette ville. Nous sommes en lien avec le Secours Catholique, Caritas France, qui a ici un vaste lieu d’accueil avec de nombreux bénévoles. Les exilés peuvent être parfois 500 et plus dans ce lieu l’après-midi. Leur présence est le reflet des guerres, des difficultés à survivre dans certains pays… Beaucoup sont très jeunes, ils ont fait de très longues routes périlleuses, et ont parfois subi des tortures, des viols…
Et ils vivent ici dans des conditions inhumaines : ils sont harcelés par tous les moyens par les forces de l’ordre pour les décourager de rester sur Calais. Soumis à de fréquents démantèlements de leur lieu de vie, ils perdent leurs affaires personnelles, papiers, téléphones, vêtements, parfois leur tente. Dans leur campement, ils manquent d’eau, d’accès aux toilettes, de sécurité. Ces conditions de vie et les violences subies (coups, gaz lacrymogène etc.) ont de graves conséquences sur leur santé physique et morale. Nous avons eu à déplorer de plus en plus de décès parce que les passeurs obligent les exilés à monter sur des petits bateaux surchargés. Ils sont de plus en plus découragés par la politique migratoire en Europe, toujours plus inhumaine.
Profondément touchées et bien démunies, nous essayons d’être une présence fraternelle, qui apporte de l’espoir. Que le Seigneur nous aide à laisser transparaitre son visage. Nous croyons que la Vie est plus forte que la mort !
Anne-Laurence
Depuis septembre j’ai rejoint la Mission de Calais, ce dont je rêvais depuis 2018, lorsque j’ai dû arrêter mes courts séjours là-bas ! Me voici de nouveau rue Pascal dans notre petite maison et jardinet qui fait ma joie : j’y ai planté des bulbes de tulipes, espérant qu’elles sortent au printemps… Je retrouve Françoise et sa vitalité et j’apprends à connaître Maria Vittoria qui vient nous rejoindre chaque semaine pour relire ensemble notre vécu. Grâce à elles, je prends facilement mes repères dans la ville et dans la paroisse.
Mon engagement est essentiellement au Secours Catholique auprès des exilés, à l’Accueil de jour, 3 après-midis par semaine. J’essaie d’être disponible et bienveillante, témoin de l’amour inconditionnel de Dieu pour chacun et d’aider à la mesure de mes moyens : à la cuisine pour faire des tartines de confiture, à la buanderie pour faire tourner les essoreuses, dans la grande salle pour jouer à « Puissance 4 » avec l’un ou l’autre, parler trois mots d’arabe avec des Soudanais ou baragouiner l’anglais avec des Pakistanais ou Syriens, etc… Je suis touchée par le courage et la détermination farouche de ces jeunes hommes fixés sur la traversée de la Manche, dans des conditions terribles ! Je me sens souvent impuissante ; il n’y a que la prière qui me délivre de la colère et de l’incompréhension face à notre politique nationale et européenne contre les migrants !
A la paroisse, j’ai proposé des accompagnements spirituels, une initiation à la prière avec la Parole de Dieu selon saint Ignace durant l’Avent et d’animer une des petites « fraternités » que le curé souhaite voir développer sur la paroisse. J’ai aussi beaucoup de joie à accompagner une communauté locale de CVX à Saint Omer.
Françoise
Depuis 8 ans déjà à Calais, je me rends compte que le Seigneur m’a aidée à évoluer. Après ma révolte des premiers temps, Il m’apprend à accueillir mon impuissance par une grande confiance en Lui. Il a vaincu la mort, Il est plus puissant que le mal que l’on voit tant à l’œuvre ici. J’essaie de voir ce qui est beau, bon : tous ces jeunes meurtris et humiliés qui restent souriants malgré l’angoisse qui les habite ; je vois tous ces bénévoles qui donnent leur temps, leurs compétences, à longueur d’année ; je vois ces jeunes des Scouts, du MEJ ou d’une aumônerie qui prennent 8 à 15 jours de leurs vacances, enthousiastes et bien conscients de recevoir autant qu’ils donnent.
À l’accueil du Secours Catholique, j’aide au raccommodage des vêtements et sacs. Je propose de faire du dessin, des jeux ou des leçons de français. Je donne quelques soins et réponds comme je peux à leurs besoins. L’essentiel est qu’ils se sentent accueillis comme des êtres humains, des frères.
Maria Vittoria
Déjà trois ans qu’à l’appel du Secours Catholique, j’ai commencé une nouvelle aventure en allant vivre dans un appartement du centre-ville avec des jeunes en service civique et des bénévoles, pour les accompagner et favoriser leur insertion et service auprès des exilés à Calais. Parfois, quand c’est possible et que c’est nécessaire, nous aménageons notre salon ou nos chambres pour accueillir l’un ou l’autre qui passerait la nuit dehors.
Je m’occupe aussi de l’accueil des femmes et des enfants, d’un projet d’intégration entre réfugiés et Calaisiens à travers le cinéma, de la sensibilisation dans les écoles, les associations avec une exposition de dessins et peintures réalisés à l’accueil de jour, dénommée « Parcours des Invisibles ».
Sur la paroisse, je fais partie de l’EAP, du Groupe Jeune Pro que se réunit une fois par mois et d’une Fraternité, qui se réunit tous les 15 jours pour prier et partager.
J’appartiens aussi à la nouvelle association caritative paroissiale née pour gérer une maison d’accueil pour migrants.